Esquisse d’un plan de relance économique

20 septembre 2014

Esquisse d’un plan de relance économique

Article publié il y a une année et demeure d’actualité

La question fondamentale qui se pose aujourd’hui aux autorités d’un grand nombre de pays en développement surtout ceux assez endettés vis-à-vis de l’extérieur, est la suivante : comment assurer une croissance économique tout en rétablissant une balance des paiements viable et un accès normal aux sources de financement extérieur dans un environnement international empreint de nombreuses incertitudes.

Certains pays ont voulu différer pendant quelques temps le réaménagement nécessaire de leurs politiques économiques en empruntant à l’extérieur, en utilisant leurs réserves de change ou en imposant des restrictions administratives aux importations des biens et services. Cette stratégie de report à un coût élevé en termes de croissance et d’endettement surtout si les sources de financement seront taries.

La réduction du déséquilibre extérieur généralement sur recommandations des plans d’ajustement structurels, s’est alors opérée d’une manière brutale et automatique dans des conditions toujours dommageables pour l’économie, souvent difficiles à supporter sur le plan social (austérité budgétaire et corruption) et politique (perte de la souveraineté).

S’il est vrai qu’un pays ne peut pas se soustraire longtemps à la nécessité de réduire son déséquilibre extérieur, la manière avec laquelle il effectue cette réduction est cruciale du point de vue de la croissance économique et de la répartition des revenus. De ce fait, un rééquilibrage de la balance des paiements avec réduction du déséquilibre extérieure peut servir la croissance.

Il n’y a plus de « recettes type » de politique économique qui soit efficace pour tous les pays. Les pays sont trop différents sur le triple plan économique, politique et institutionnel pour qu’une approche unique et mécanique puisse réussir.

Pour la Tunisie, une réorientation de la politique économique s’impose surtout que le modèle économique actuelle ne cadre pas avec les objectifs assignés au gouvernement de transition en matière de création de l’emploi et la maitrise du pouvoir d’achat.

L’agence de notation Standard and Poor’s comme Moody’s d’ailleurs a abaissé de deux crans la note de la dette à long terme de la Tunisie reléguant ainsi le pays dans la catégorie des emprunteurs spéculatifs. Cette dégradation, quoique, importante en termes d’effet d’annonce sur les intentions d’investissement, ne semble pas assez déterminante tant sur le plan économique car d’une part la dette privée ne représente que 30% du total de la dette extérieure tunisienne et qu’à ce titre, les effets de la dégradation seront assez limités et d’autre part, la Tunisie bénéfice (jusqu,à 2012 je crois) d’une contre-garantie américaine (USAID) qui permet un accès sur les marchés internationaux (obligataires) certes facile mais plafonné et limité dans le temps et avec un spread tolérable. Une première utilisation de cet instrument a eu lieu en juillet 2012 où la Tunisie a réussi à lever 485 millions de dollars par le biais d’une émission obligataire. C’est un emprunt à sept ans adossé sur une garantie de remboursement de l’État américain de 100% sur le principal et les intérêts.

Le taux de l’émission comme le précise le Trésor américain s’est établi à 1,686%. Ce taux très avantageux a été rendu possible par la garantie des États-Unis, qui bénéficient de la note de solvabilité maximale (« AAA ») auprès de deux des trois grandes agences de notation, et dont les taux d’emprunt sont parmi les plus bas du monde.

Mais ce privilège semble du passé et la Tunisie se doit de rechercher d’autres alternatives surtout face à un tiraillement politique et la non visibilité de la transition démocratique.

Afin de redresser la situation économique surtout avec une nouvelle donne non moins importante, à savoir l’expansionnisme budgétaire avec un déficit prévu de plus de 8%, un recadrage de la politique économique autour de certaines mesures de stabilisation et des mesures structurelles, me semble appropriée:

1- Une politique structurelle qui influence indirectement le niveau de la production courante et le potentiel de production.

2- des mesures d’accompagnement (politique fiscale rigoureuse, politique monétaire plus accommodante et une politique de change beaucoup plus flexible pour amortir les chocs)

Loin des ambitions des partis politiques, ce programme constitue un effort personnel qui essaye de tracer les contours d’une politique économique à composante sociale qui va de pair avec les réalités et les défis auxquels fait face la Tunisie post-révolution.

Radioscopie économique

Les événements qui ont marqué l’après 14 janvier 2011, ont auguré une nouvelle étape chaotique dans le cycle de vie économique du pays.

– Poursuite d’un climat d’attentisme même après l’achèvement du processus électoral – Chute brutale de la demande et de l’offre, avec perturbations du système productif – Dégradation continue du rating souverain – Des pressions sur l’activité économique, notamment la lenteur du rythme de la croissance, le ralentissement des exportations, le recul des recettes touristiques et la contraction de l’investissement tant intérieur qu’étranger et la baisse des réserves de change suite aux retombés de la crise de la dette souveraine dans les pays de la zone euro

– un accroissement du déficit courant qui a atteint 7% du PIB

– chute des réserves en devises.

– Pression énorme sur la liquidité

– persistance des tensions sur les prix d’un certain nombre de produits alimentaires et inflation contextuelle importante

Les autorités tunisiennes ont privilégié durant cette phase du processus le maintien du fonctionnement du système de paiement et le soutien d’urgence de la liquidité bancaire pour atténuer la procyclicité et poursuivre un financement de l’économie non dopé par des pressions inflationnistes éxagérées.

De même le gouvernement a approuvé dans une période difficile une augmentation salariale afin d’apaiser un tant soi peu le climat social et estomper les tensions qui en découlent. Or, l’investissement demeure freiner et l’économie bloquée pendant deux années durant lesquels on a assisté à des sit-in et des grèves de tout genre qui ont des fois poussé à l’extrême jusqu’à paralyser un pays en état d’agonie. On est arrivé à une situation où au lieu de combattre le chômage, on en rajoute encore.

En l’absence de visibilité économique, la marge d’intervention de la politique monétaire pour appuyer l’activité économique est devenue limitée et la croissance se profile à des plus bas niveaux.

Le gouvernement est partagé entre l’économique (répondre aux exigences les plus inadmissibles en situation de stress à l’instar de l’urgence d’un développement régional équitable) et le politique (prendre des mesures électoralistes pour s’assurer de sa continuité). Finalement, il n’a réussi ni l’un ni l’autre.

I- Pré-requis pour une sortie de crise

– Il faut promouvoir la souveraineté financière du pays pour relancer l’économie à un rythme soutenable. Cela suppose le renforcement de la compétitivité, le renouvellement du modèle social

– il faut imposer l’autorité de la République face à la violence et aux pressions de ceux qui veulent faire passer leurs règles avant celle de la république

– l’adhésion franche de toutes les composantes vives de la société autour d’un projet unique bénéficiant d’un consensus populaire. D’ailleurs, je ne crois pas que cette deuxième phase de transition sera la plus idoine pour redonner espoir à l’économie nationale.

Dans ces conditions difficiles, il y‘a deux choix : soit veiller aux équilibres macroéconomiques standards et se lancer dans une politique d‘austérité, soit poursuivre une politique budgétaire de relance. La première consiste à tailler les dépenses en particulier sociales et de compensation tout en réduisant les déficits, alors que la seconde consiste à creuser les déficits tout en augmentant les dépenses.

II- Mesures d’urgence

1. Adopter un plan de relance économique keynésien réfléchi en renforçant l’investissement public à rentabilité à court et à moyen terme. Le déficit public sera financé en partie avec l’émission des bons de trésor (avec ouverture des souscriptions aux non-résidents qui jusque là sont astreint à une limite de 20%) et des fonds d’appui à la relance (contractés avec la BIRD, BAD, FADES, AFD à des taux bonifiés)

2. Ne pas trop lever des fonds sur les marchés obligataires internationaux en s’appuyant sur la garantie américaine, car le Tunisie pourra envoyer un signal négatif aux marchés laissant entrevoir une volonté de puiser dans cet instrument sans stratégie aucune.

3. Sacrifier l’inflation en tant qu’objectif cible et revoir l’objectif pour le recentrer autour du développement économique. Évidemment une analyse affinée des sources de l’inflation (inflation importée, excès de la demande, pénurie de l’offre, offre monétaire, dévaluation du dinar..etc) doit se faire pour agir en conséquence.

4. Faire baisser le taux directeur de la banque centrale à un niveau où son impact sur le TMM serait significatif tout en maitrisant l’endettement des ménages (adopter certaines contingences) et surtout en acceptant quelques effets pervers (érosion monétaire, répression financière et inflation)

5. Soumettre le secteur bancaire à un plan d’assainissement et de restructuration III. Mesures à moyen et long terme

1. S’orienter vers un modèle de croissance reposant sur l’afflux d’investissements étrangers surtout non générateurs de dette (la sécurité est une condition sine qua none pour sa réussite)

2. L’économie tunisienne ne génère structurellement pas assez d’épargne pour financer l’investissement dans le développement de ses activités productives. Elle a besoin des flux de capitaux stables non générateurs de dette pour amorcer sa croissance. Les IDE sont nécessairement dépendants de facteurs extérieurs, mais surtout intérieurs (infrastructure, fiscalité de faveur, climat d’affaire sain , politique claire et transparente en matière de lutte anti-corruption, la protection des investisseurs, garantie de Transfert des capitaux, incitations fiscales, partenariat non contraignant, main d’œuvre qualifiée).

3. La nécessaire mobilisation d’investissements nationaux à la fois stables et volumineux supérieurs à leur niveau actuel, pour nourrir une croissance forte et durable qui permette de résorber le chômage. Ces investissements devraient profiter à l’ensemble du territoire en particulier les régions défavorisées selon leurs spécificités régionales.

4. La Tunisie pourrait profiter pleinement de sa demande intérieure dynamique et de son tissu entrepreneurial composée des PME. De plus, si la stabilité politique du pays se renforce, la question du modèle économique prendra certainement, au cours des prochaines années, une importance de plus en plus significative pour l’investisseur potentiel.

5. L’État doit offrir toutes les garanties possibles aux investisseurs pour que le site tunisien soit le plus convoité par rapport à nos concurrents directs ô combien ils sont nombreux.

  •  La suppression de l’autorisation du conseil supérieur d’investissement ou du moins son assouplissement et ce, pour toutes participations étrangères dépassant les 50%
  • La réorganisation du marché financier dans le sens d’augmenter sa capitalisation (indicateur de notoriété de marché er de confiance des investisseurs) et limiter les investissements en portefeuille surtout à caractère spéculatif. Car ces afflux induisent, à court terme, l’expansion du crédit et donc la consommation, ainsi que la chute des taux des BTA. Mais ils provoquent en même temps l’appréciation du dinar, pénalisant ainsi la compétitivité de l’économie et aggravant le déficit commercial.
  • Une diversification de l’économie comme rempart face aux chocs exogènes Au-delà de l’aspect strictement macroéconomique, le déséquilibre dans la composition du PIB fait apparaître une vulnérabilité manifeste surtout en présence de deux secteurs sensibles (tourisme et agriculture) de même la présence d’une industrie de transformation dépendante des composantes importées et la marginalisation des industries high-tech à forte valeur ajoutée. Sachant que la productivité globale des facteurs reste en deçà des normes.
  • Revoir la stratégie industrielle dans le sens du renforcement d’un partenariat étranger qui permet le transfert du savoir faire moyennant la fourniture d’un package d’incitation
  • La nécessaire diversification des cibles d’exportation (Amérique latine, moyen orient et l’Afrique)
  • L’enracinement de la culture entrepreneuriale en améliorant le climat d’affaire et en facilitant les conditions de financement des jeunes promoteurs par l’adoption du principe de parrainage
  • Instaurer un label économique (valorisation du made in Tunisia grâce à la prise en charge par l’État des frais occasionnés par la certification des produits) et entamer une compagne de communication promotionnelle à grande échelle sous le signe « Invest in eco-democracy »).

Financement

  • Assurer la liquidité des banques en levant les restrictions administratives qui entrainent un tarissement des contreparties de refinancement (en situation de stress). En situation de reprise, il faut qu’il y ait durcissement progressif des conditions de refinancement par la banque centrale pour limiter le phénomène de l’aléa moral.

  • les banques doivent adopter une politique de tarification ajustée aux risques et surtout il faut veiller à ce que le Trésor (risque souverain nul) soit financé à des conditions les plus avantageuses. (des fois, on assiste à une émission des BTA ou BTCT à 6% alors que certaines entreprises empruntent à TMM (3.5%).
  • la création de fonds budgétaires dédiés gérés par les autorités régionales me parait appropriée surtout qu’elle suppose la décentralisation et responsabilise les autorités locales qui connaissent mieux les spécificités de leurs régions.

Productivité

  • Prévoir un programme d’intéressement pour faire venir les expatriés tunisiens (l’expérience de l’Inde)

  • L’université doit s’ériger en un véritable laboratoire de recherches
  • Revoir l’échelle de priorité de l’enseignement des langues vivantes (je vise l’anglais)
  • Prévoir un système d’incitation dans la fonction publique fondé sur la promotion par le mérite et la productivité et non à l’ancienneté

Efforts institutionnels

– Une banque centrale autonome du pouvoir public et désengagement progressif de l’État des capitaux des banques. l’indépendance de la banque centrale doit être constitutionalisée

– Regrouper les banques publiques en holding financier (car appartenant toutes à un même actionnaire i faut en minimiser les coûts. La fusion ne semble pas appropriée car elle créée une distorsion concurrentielle)

– Décloisonner les secteurs on et offshore

– La Tunisie devrait, à moyen terme, maintenir un contrôle sur les mouvements des capitaux et mettre en place un régime de change à bandes de fluctuation mobile en assurant un ancrage du taux de change à un panier de devises qui pourrait être élargie au yuan chinois et fixer un corridor de fluctuations en concordance avec une politique monétaire accommodante. Instaurer l’équité fiscale

– Élargir la base d’imposition en recouvrant les impayés des contribuables récalcitrants et surtout contrôler le secteur informel qui freine la croissance de la base d’imposition (exiger un système de patente ou de licence allégée)

– Contenir la masse salariale et comprimer les dépenses peu prioritaires tout en continuant de préserver les acquis des secteurs sociaux.

Le relèvement projeté de l’effectif de la fonction publique pour absorber la demande additionnelle des chômeurs diplômes est une erreur très grave qui sape tout effort de redressement des comptes de la nation car avec une productivité quasiment nulle et en l’absence d’amortisseurs sociaux, le risque est que l‘augmentation serait uniquement dans les dépenses récurrentes de fonctionnement, en particulier les salaires, ce qui rend caduque toute politique de stabilité macroéconomique à moyen terme (les dépenses de fonctionnement constituent actuellement près de 60% des dépenses budgétisées)

– Prévoir une taxe sur les richesses d’ailleurs ça rejoint le concept islamique d’aumône, durcir la taxation en matière des droits d’enregistrement sur les opérations spéculatives (surtout les mobiliers)

– Exonérer les personnes à faible revenues et petites entreprises – Une politique sociale visant la réduction de la pauvreté et une plus grande équité sociale (gratuité des soins médicaux, prise en charge des frais de scolarité pour les plus démunis)

LA MONETISATION DE LA DETTE PUBLIQUE

Depuis un certain temps, certains pays ont abandonné le financement direct du Trésor par le recours aux concours de la banque centrale et ont opté pour le financement du déficit public aux conditions prévalant sur le marché. Cette orientation, de l’aveu même de la BCE, vise à bloquer l’option d’un financement monétaire des déficits publics et rationaliser le comportement financier de l’agent économique État en rompant avec les choix de facilité. Il semble, toutefois, que cette orientation est sujette à critique?

Partant d’une hypothèse d’efficience où le recours à l’endettement public ne vient pas en compensation d’une gestion insuffisamment rigoureuse des dépenses publiques, le financement du Trésor a permis de renchérir le coût du crédit du fait de l’action qu’il exerce sur les taux d’intérêt (souscription des banques aux bons de Trésor et pression sur la liquidité bancaire) et l’effet d’éviction qu’il entraîne sur les agents économiques (aversion aux risques, préférence des banques pour un placement sans risque).

Mieux encore, l’Etat recourt aux banques pour se financer. Ce faisant, il rachète sa monnaie avec intérêts du moment qu’il a abandonné le droit « régalien » de création monétaire, au profit des seules banques.

Beaucoup d’appels se sont lancés pour plaider le retour au financement de la banque centrale à taux nul, mais semble t-il, ce n’est pas sûr que la monétisation directe de la dette publique solutionne structurellement le dilemme de la dette publique. Pourquoi?

Les banques seront privées “d’un free lunch”/ repas gratuit dans la mesure où elles financent une contrepartie souveraine avec intérêts L’État ne se considère plus comme un agent économique et partant on ne peut tolérer sa présence dans le système productif L’alimentation de l’alea moral du fait que l’État dispose théoriquement d’une manne financière importante

Si l’État a un rôle économique, la banque centrale a un rôle strictement monétaire. Son appui à l’État risque de fausser sa propre politique de stabilité des prix. D’ailleurs, les politiques d’austérité exigées en période de crise ne s’analyserait pas comme un acte pour préserver la solvabilité des États mais d’éloigner la menace du financement monétaire.

REAGIR AU DILEMME DU PRISONNIER

OU LA GOUVERNANCE PAR L’ENDETTEMENT

Les pays en développement, la Tunisie n’en fait pas l’exception, ont été depuis longtemps soucieux du fameux dilemme désendettement/développement.

Après un train de mesures drastiques, ces pays se retrouvent aujourd’hui, condamner à gérer un double handicap; le non développement et le fardeau de la dette dont une grande part à caractère odieux. L’enjeu est de taille, il dépasse, à mon sens, la théorie des jeux car il pose un vrai problème d’optimisation sous une infinité de contraintes: allouer le peu de ressources dont ils disposent entre la recherche des sentiers de développement soutenu et le remboursement de leurs dettes sans les alourdir par le recours à financement extérieur suicidaire de type Ponzi (s’endetter pour rembourser des dettes antérieures).

La solution ne semble pas évidente car, passivité tiers-mondiste oblige, ces pays se contentent de manifester soient leurs bons accueils, soient leurs reproches aux solutions qui parviennent des pourvoyeurs des fonds sans pour autant arriver à imposer les leurs.

La prise de conscience de l’effet dramatique d’un endettement insoutenable, les enseignements tirés de la crise économique de la Grèce, nous interpelle forcément à invoquer la problématique du financement de la dette publique, du recours systématique à l’endettement extérieur et les fameuses agences de notation cauchemardesque qui ne font qu’accélérer les problèmes et précipitent les difficultés.

S’endetter ne fera qu’accroître l’illusion de richesse. S’endetter mais à quel prix? Au prix de la dignité et de la colonisation sous sa forme la plus cruelle. La dette sous sa forme actuelle, comme l’a bien dit Thomas Sankara « est une reconquête savamment organisée de l’Afrique, pour que sa croissance et son développement obéissent à des paliers, à des normes qui nous sont totalement étrangers. Faisant en sorte que chacun de nous devienne l’esclave financier, c’est-à-dire l’esclave tout court, de ceux qui ont eu l’opportunité, la ruse, la fourberie de placer des fonds chez nous avec l’obligation de rembourser ».

Martín Lozada, décrit dans un de ses articles les conséquences de la dette extérieure, en signalant le fait que le paiement de cette dette « réduit et conditionne toute possibilité de développement des pays sous-développés, en diminuant violemment le niveau de vie des populations, en réduisant les possibilités d’emploi, et en sapant peu à peu les systèmes de santé et d’éducation des pays endettés. »

Alors, à quoi bon payer ses dettes?

Souvent on avance les arguments comme la crédibilité de la place, le privilège d’accès aux marchés pour lever des fonds facilement, la notoriété du pays vis à vis de l’extérieur, l’amélioration de la note sur le risque souverain..etc. Il semble, néanmoins, que ces arguments laissent entrevoir une volonté franche de perdurer le phénomène d’endettement en dépit de ses conséquences désastreuses sur les classes prolétaires…….

Les remèdes qui tuent

Les dix préceptes du Consensus de Washington pour venir au secours d’un pays en situation d’endettement chronique. Une ordonnance bourrée d’antalgique qui, in fine, mettra le pays à genoux.

1- une cure d’amaigrissement sous forme d’austérité budgétaire, 2- Action sur les dépenses publiques par une réduction des subventions, 3- Promotion d’une politique monétaire orthodoxe basée sur la libéralisation des taux d’intérêt, 4- Ouverture extérieure, 5- Libéralisation, 6- Privatisation, 7- Déréglementation, 8- Réforme fiscale, 9- Droits de propriétés notamment au profit des étrangers

Alors que faire?

Une solution alternative est-elle possible pour régler le problème systémique de l’endettement, principale cause des mobilisations de ces dernières semaines en Grèce, en Espagne- comme de celles à venir…Peut on imaginer un pays qui fonctionne convenablement sans endettement surtout que la théorie financière nous enseigne que l’endettement valorise l’expansion par l’effet de levier..

Entre l’idéologie néolibérale inscrivant le recours à l’endettement dans la logique de développement économique des nations (optique gagnant-gagnant) et les revendications de la société civile qui voit que la  » Tunisie a, plus que jamais, besoin de garder ses richesses à l’intérieur et de stopper l’hémorragie qui la saigne à l’heure actuelle afin de reconstruire son avenir sur de nouvelles bases saines (*) » la seule vérité qui se dégage c’est qu’on est en présence d’un dilemme du prisonnier, un cas célèbre de la théorie des jeux, caractérisant les situations de deux joueurs ou des agents économiques qui sont amenés chacun de leur côté à prendre des décisions qui sont individuellement sous-optimales et où ils auraient intérêt à coopérer pour s’en sortir à moindre dégâts.

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