Pays en développement face au dilemme du prisonnier

24 mars 2015

Pays en développement face au dilemme du prisonnier

Les pays en développement et surtout africains ont été depuis longtemps soucieux du fameux dilemme désendettement/développement. Après un train de mesures drastiques, ces pays se retrouvent aujourd’hui, condamner à gérer un double handicap : le non-développement et le fardeau de la dette, dont une grande part à caractère odieux. L’enjeu est de taille, il dépasse, à mon sens, la théorie des jeux car il pose un vrai problème d’optimisation sous une infinité de contraintes. En effet, ces pays doivent allouer le peu de ressources dont ils disposent entre la recherche des sentiers de développement soutenu et le remboursement de leurs dettes sans les alourdir par le recours à financement extérieur suicidaire de type Ponzi (s’endetter pour rembourser des dettes antérieures).

La solution ne semble pas évidente, passivité tiers-mondiste oblige. Ces pays se contentent de manifester soit leurs bons accueils, soit leurs reproches aux solutions qui parviennent des pourvoyeurs des fonds sans pour autant arriver à imposer les leurs.

La prise de conscience de l’effet dramatique d’un endettement insoutenable, les enseignements tirés de la crise économique de la Grèce, nous interpellent forcément à invoquer la problématique du financement de la dette publique, du recours systématique à l’endettement extérieur et les fameuses agences de notation cauchemardesques qui ne font qu’accélérer les problèmes et précipitent les difficultés.

La gouvernance par l’endettement :

S’endetter ne fera qu’accroître l’illusion de richesse. S’endetter, mais à quel prix ? Au prix de la dignité et de la colonisation sous sa forme la plus cruelle. La dette sous sa forme actuelle, comme l’a bien dit Thomas Sankara  » est une reconquête savamment organisée de l’Afrique, pour que sa croissance et son développement obéissent à des paliers, à des normes qui nous sont totalement étrangers. Faisant en sorte que chacun de nous devienne l’esclave financier, c’est-à-dire l’esclave tout court, de ceux qui ont eu l’opportunité, la ruse, la fourberie de placer des fonds chez nous avec l’obligation de rembourser « .

Martín Lozada, décrit dans un de ses articles les conséquences de la dette extérieure, en signalant le fait que le paiement de cette dette  » réduit et conditionne toute possibilité de développement des pays sous-développés, en diminuant violemment le niveau de vie des populations, en réduisant les possibilités d’emploi, et en sapant peu à peu les systèmes de santé et d’éducation des pays endettés.  »

Alors, à quoi bon payer ses dettes?

Souvent on avance les arguments comme la crédibilité de la place, le privilège d’accès aux marchés pour lever des fonds facilement, la notoriété du pays vis-à-vis de l’extérieur, l’amélioration de la note sur le risque souverain… Il semble, néanmoins, que ces arguments laissent entrevoir une volonté franche de perdurer le phénomène d’endettement en dépit de ses conséquences désastreuses sur les classes prolétaires…….

Les remèdes qui tuent

Les dix préceptes du Consensus de Washington pour venir au secours d’un pays en situation d’endettement chronique. Une ordonnance bourrée d’antalgique qui, in fine, mettra le pays à genoux.

1- une cure d’amaigrissement sous forme d’austérité budgétaire,

2- Action sur les dépenses publiques par une réduction des subventions,

3- Promotion d’une politique monétaire orthodoxe basée sur la libéralisation des taux d’intérêt,

4- Ouverture extérieure,

5- Libéralisation,

6- Privatisation,

7- Déréglementation,

8- Réforme fiscale,

9- Droits de propriété notamment au profit des étrangers

Alors que faire

Une solution alternative est-elle possible pour régler le problème systémique de l’endettement, principale cause de mobilisation citoyenne et de soulèvement populaire… Peut-on imaginer un pays qui fonctionne convenablement sans endettement surtout que la théorie financière nous enseigne que l’endettement valorise l’expansion par l’effet de levier…

Entre l’idéologie néo-libérale inscrivant le recours à l’endettement dans la logique de développement économique des nations (optique gagnant-gagnant) et les revendications de la société civile, que faire ? On voit que nos pays ont plus que jamais besoin de garder leurs richesses et de stopper l’hémorragie qui les saigne pour reconstruire l’avenir sur de nouvelles bases saines. La seule vérité qui se dégage, c’est qu’on est en présence d’un dilemme du prisonnier, un cas célèbre de la théorie des jeux, caractérisant les situations de deux joueurs ou des agents économiques qui sont amenés chacun de leur côté à prendre des décisions qui sont individuellement sous-optimales et où ils auraient intérêt à coopérer pour s’en sortir à moindres dégâts…

 

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